L’accent est vraiment mis sur les rénovations globales des passoires énergétiques détenues par des ménages aux faibles ressources.

Les aides à la rénovation énergétiques des logements vont encore évoluer en 2024 afin d’essayer de répondre aux ambitions de forte accélération les rénovations globales en ciblant les passoires énergétiques. Cette montée en cadence devient d’ailleurs impérative si on veut respecter le calendrier d’interdiction progressive à la location de ces logements mal isolés. La prochaine étape est pour janvier 2025 avec l’interdiction à location de tous les logements notés G au DPE.
Le gouvernement ambitionne 200.000 rénovations "d'ampleur" dès 2024 (dont 80.000 en copropriété) alors que le nombre de rénovations globales s’est limité à 67.000 en 2022. Un effort budgétaire conséquent a pour cela été mobilisé : 1,6 milliard d’euros sera alloué aux aides à la rénovation énergétique, en particulier MaPrimeRénov’, pour atteindre l’an prochain 5 milliards d’euros au total.
Parcours accompagné
À partir du 1er janvier 2024, MaPrimeRénov’ évolue donc une fois de plus en profondeur. L’essentiel du dispositif reposera désormais sur les travaux de rénovation permettant un gain minimal de 2 classes sur leur DPE avec un accompagnement dans les démarches techniques, administratives et financières, mon accompagnateur Rénov’, qui devient systématique. Cette prestation d’accompagnement sera financée à hauteur de 100% pour les ménages aux revenus très modestes, 80% pour les revenus modestes, 40% pour les revenus intermédiaires et 20% pour les revenus supérieurs, dans la limite d’un coût plafond de 2.000€ qui pourra atteindre 4.000 € dans les situations spécifiques de traitement de l’habitat indigne et de la précarité énergétique pour les ménages aux revenus les plus modestes.
Comme souvent, il reste à voir si les accompagnateurs agréés seront assez nombreux pour répondre à la demande… Les acteurs privés vont progressivement pouvoir jouer ce rôle : il pourra notamment s’agir d’architectes ou d’auditeurs énergétiques qualifiés. Sachant que les tarifs de l’accompagnement sont libres et non réglementés et qu’ils seront donc variables en fonction des communes, pour ceux qui ne bénéficieront pas ou de peu de prise en charge de ce coût supplémentaire, les choses semblent d’ailleurs s’annoncer une nouvelle fois compliquées.
Jusqu’à 70.000 € de travaux (35.000 € aujourd’hui)
Les taux de financement et les plafonds de travaux éligibles seront significativement relevés mais toujours en ciblant les ménages aux revenus les plus modestes (68% des bénéficiaires de MaPrimeRénov’ sont à ce jour des ménages aux revenus modestes) alors que les aides sont très réduites pour les classes moyennes. Jusqu’à 70.000 € de travaux (35.000 € aujourd’hui) pourront ainsi être pris en compte en cas d’un saut de 4 classes de DPE avec un taux de prise en charge pouvant atteindre 90% pour les ménages aux revenus de la classe très modestes rénovant une passoire thermique. Parmi les autres conditions, il faudra réaliser au minimum deux gestes d’isolation et le traitement de la ventilation.
Le ministère cite l’exemple d’un couple avec un enfant avec des revenus annuels limités à 25.000 € ou celui d’un couple sans enfant avec des revenus annuels de 35.000 € qui pourront ne supporter qu’un reste à charge de 15% sur une rénovation globale de maison alors que les barèmes actuels leurs laissent plus de la moitié à financer après déduction des aides (CEE et MaPrimeRénov’). Dans ces deux cas précis, les aides seront augmentées de plusieurs dizaines de milliers d’euros.
En Ile-de-France par exemple, pour un ménage constitué de 3 personnes, les ressources (revenu fiscal de référence 2022) ne doivent pas dépasser 39.591 € dans la catégorie des revenus très modestes et 48.197 € dans la catégorie des revenus modestes. Dans les autres régions, ces deux montants sont respectivement de 28.545 € et 36.591 €.
Enfin un début d'harmonisation des CEE et de MaPrimeRénov’
Un gros progrès est à souligner pour ce parcours de rénovation accompagné car l’Anah se chargera l’an prochain de valoriser elle-même les aides au titre des certificats d’économies d’énergie (CEE). On assiste donc enfin à un début d'harmonisation des aides au titre des CEE et de MaPrimeRénov’ : les deux seront intégrées sans autre démarche de la part des ménages. Il faut en effet savoir que la prime CEE peut être supérieure à MaPrimeRénov’ pour une pompe à chaleur.
« L’incitation aux rénovations d’ampleur est une très bonne chose, mais se pose toujours la question du financement du reste à charge une fois les aides perçues, en particulier pour les ménages des classes moyennes qui sont très peu aidés dans le cadre de MaPrimeRénov’. Néanmoins, ils peuvent percevoir des certificats d’économies d’énergie d’un montant de 2.500 € pour l’installation d’une pompe à chaleur. Résultat, de nombreux propriétaires vont devoir encore arbitrer entre réaliser des travaux geste par geste qui permettent parfois de sortir de la situation de passoires avec un reste-à-charge d’environ 10.000 €, ou effectuer une rénovation globale avec un reste à charge pouvant vite atteindre les 50.000 € », tempère Romain Villain, directeur général de la plateforme d’aide au financement de la rénovation énergétique Heero.
Aides aux monogestes recentrées sur les pompes à chaleur
Pour les ménages qui ne souhaitent pas s’engager dans des travaux d’ampleur ou dont le bâti a déjà une performance énergétique suffisante, des forfaits par postes de travaux resteront accessibles mais ils sont réorientés vers l’installation de pompes à chaleur air/eau et géothermiques. Des aides de 1000€ à 2000€ sont prévues pour les ménages aux revenus modestes et intermédiaires afin d’accentuer la dynamique de remplacement des chaudières fonctionnant aux énergies fossiles (fioul et gaz). Le confort d’été sera pris en compte avec des aides à l’installation de pompes à chaleur (y compris air/air réversibles) permettant de rafraichir l’air, de brasseurs d’air et des solutions passives telles que les protections solaires de parois vitrées. Mais attention, les propriétaires de maisons individuelles d’étiquette F ou G (passoires énergétiques) ne pourront plus en bénéficier et seront obligatoirement réorientés vers le parcours accompagné.
Artisans RGE
En conclusion, l’accent est vraiment mis sur les rénovations globales des passoires énergétiques détenues par des ménages aux faibles ressources mais les appartements semblent à nouveau être un peu oubliés car il est le plus souvent impossible de remplacer un système de chauffage individuel ou collectif par une pompe à chaleur en copropriété. Il reste aussi à résoudre le problème du manque d’artisans RGE qui sont les seuls habilités à réaliser les travaux, sans oublier les difficultés d’accès à l’Eco-PTZ (prolongé au passage jusqu’en 2027) qui reste la solution la plus avantageuse pour financer le reste à charge.
a savoir
Un peu plus de 210.000 rénovations globales ont été comptabilisée depuis le lancement de MaPrimeRénov’ en 2020
