Réforme des retraites : ce que prévoient les nouveaux décrets

Réforme des retraites : ce que prévoient les nouveaux décrets
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Plusieurs textes d'application de la réforme sont parus au mois d'août, dont celui revalorisant le montant des petites pensions.

Réforme des retraites : ce que prévoient les nouveaux décrets
Crédit photo © iStock

La mise en place de la réforme des retraites votée au printemps prend forme en douceur. Après ceux relatifs à l’âge de départ ou encore aux régimes spéciaux, une poignée de nouveaux textes ont été publiés au Journal officiel du vendredi 11 août et du mardi 22 août.

Ils concernent un ensemble de nouvelles dispositions, notamment relatives au cumul emploi-retraite et à la retraite progressive, à la revalorisation des pensions de retraite minimum, à la création de la pension d’orphelin et de l'assurance vieillesse des aidants, au bonus de trimestres pour les femmes avec enfants ou encore à l'éligibilité d'anciens contrats aidés pour le calcul des trimestres.

Revalorisation des petites pensions

Comme attendu, les petites pensions (régime général, agricole et des cultes) seront revalorisées de 100€ par mois pour les personnes partant à la retraite à partir du 1er septembre. Selon le ministère du Travail, environ 200.000 personnes seront concernées par cette mesure.

Les pensions minimales des personnes déjà retraitées seront également revalorisées. Près de 1,7 million de retraités bénéficieront d’une revalorisation de leur retraite, dont environ 700 000 bénéficieront d’un paiement dès l’automne 2023. Les revalorisations ultérieures auront lieu au printemps 2024, avec effet rétroactif au 1er septembre 2023.

Le minimum de pension sera par ailleurs indexé sur le Smic, et non plus sur l’inflation.

Recours à l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA)

Ces décrets relèvent le seuil de récupération sur succession de 39.000€ à 100.000€ pour la métropole, ainsi que son indexation sur l’inflation (le seuil ayant été relevé de 100.000 à 150.000€ dans les outre-mer). La durée de résidence sur le territoire exigée pour le bénéfice de l’ASPA est désormais fixée à neuf mois par an.

Création de la pension d’orphelin au régime général

Ces décrets fixent les conditions d’accès à la pension d’orphelin, créée par l’article 18 de la Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, afin de lutter contre la précarité des moins de 21 ans ayant perdu leurs deux parents. Elle pourra être perçue jusqu’à 25 ans sous condition de ressources, notamment pour les étudiants, et sans limite d’âge pour les orphelins souffrant d’un handicap supérieur à 80% avant leur 21 ans. Le plafond de ressources applicable en 2023 s’élève à 12.570,55€.

Création de l’assurance vieillesse des aidants (AVA)

Afin de renforcer les droits à retraite des aidants, ces décrets permettent d’ouvrir les droits à l’assurance-vieillesse à de nouveaux aidants : d’une part, les parents d’enfants handicapés dont le taux d’incapacité est inférieur à 80% mais qui sont éligibles au complément de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH), ce qui permet notamment aux parents d’enfants bénéficiaires de la prestation de compensation du handicap (PCH) de se voir ouvrir des droits à la retraite au régime général, et d’autre part les aidants d’adultes handicapés non-cohabitants ou ne présentant pas de lien familial, mais uniquement un lien stable et étroit avec la personne aidée.

Retraite progressive

Concernant la retraite progressive, le nouveau dispositif permettra aux personnes en fin de carrière, dans le public comme dans le privé et pour les libéraux, d’opter pour un temps partiel et de bénéficier en parallèle d’une partie de leur pension de retraite deux ans avant l’âge légal de la retraite.

Pour les salariés, l’accès à la retraite progressive est facilité : la charge de la preuve est inversée au bénéfice du salarié puisque l’employeur doit désormais justifier son refus de temps partiel pour une demande de retraite progressive et son silence à l’issue d’un délai de deux mois vaut accord.

Les conditions d'accès à la retraite progressive des chefs d'exploitation agricole sont également simplifiées.

Cumul emploi-retraite

Les nouvelles règles de cumul emploi-retraite permettront aux retraités d’occuper un emploi pour disposer de droits à la retraite et ainsi améliorer le montant de leur pension. Si ces revenus sont soumis à cotisations, ils n’ouvraient jusqu’à maintenant aucun droit à une pension supplémentaire.

Désormais, les retraités en cumul emploi-retraite peuvent se créer de nouveaux droits à retraite. A l’issue d’une période de cumul emploi retraite, il sera possible, sous certaines conditions de demander une seconde pension calculée sur la base des mêmes règles que la première pension.

Bonus de pensions pour les mères de famille

Cette mesure concernera les femmes avec enfant(s) ayant cumulé 43 années de cotisations un an avant l’âge légal de départ en retraite à 64 ans. Le bonus pourra atteindre 5%, à raison de 1,25% de surcote par trimestre supplémentaire travaillé au-delà de 63 ans et des 43 années de cotisation et jusqu’à 64 ans.

Un dispositif qui, de fait, ne sera donc pas attribué aux femmes arrivées tardivement sur le marché du travail ou ayant eu de longues interruptions de carrière, car même si les trimestres acquis au titre du congé maternité (1 supplémentaire pour 90 jours de congé parental pour les salariées) et de l’éducation des enfants (schématiquement 8 par enfant né ou adopté avant 2010, 4 pour "maternité" et 4 pour "éducation" après 2010), dans la plupart des cas, pour en bénéficier, il faudra avoir commencé à cotiser à 23 ou 24 ans et sans interruption de carrière importante.

Prise en compte d’anciens contrats aidés dans le calcul des trimestres

Le contrat de travaux d’utilité collective, un dispositif d’insertion pour les jeunes disparu en 1990, ouvrira droit à des trimestres de cotisations, dont le nombre n’a pas encore été précisé. La mesure peut sembler anecdotique, mais d’après la Première ministre, Elisabeth Borne, elle pourrait concerner tout de même plus d’un million de personnes. Pour retrouver les futurs retraités éligibles, un service en ligne sera déployé par la Caisse nationale d’assurance maladie.

D’autres anciens dispositifs mis en place dans les années 80 et 90 seront également pris en compte dans le calcul des trimestres, comme les stages "jeunes volontaires", "d’initiation à la vie professionnelle", des stages "pratiques en entreprise" et des programmes d’insertion locale.

Doublement des trimestres pour les sportifs de haut niveau

Pour les sportifs de haut niveau, enfin, le nombre de trimestres acquis au titre de leur période d’activité professionnelle passera de 16 trimestres maximum à 32. Cette majoration s’applique aux périodes d’inscription en tant que sportif de haut niveau à compter du 1er janvier 2023.

Rachats de trimestres de retraite

Le rachat possible de trimestres pour études supérieures pourra être demandé, à compter du 1er septembre, jusqu’au 31 décembre de l’année des 40 ans de l’assuré, et non plus dix années après la fin des études. Celui pour les stages en entreprise sera possible jusqu’au 31 décembre de l’année de ses 30 ans, et non plus dans les deux années suivant la réalisation du stage.

Création du Fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle (FIPU)

Ce fonds, destiné à améliorer la prévention des expositions aux facteurs de risques professionnels dits “ergonomiques”, sera doté d’un milliard d’euros sur cinq ans. L'enveloppe financera des démarches de prévention et de sensibilisation au niveau des entreprises et des branches professionnelles.

Ses orientations et la répartition de ses crédits seront définies par la branche Accidents du travail-Maladies professionnelles de l'Assurance maladie, qui établira une cartographie des métiers exposés aux facteurs de risques ergonomiques.

Amélioration du compte professionnel de prévention

Il sera désormais plus aisé d’alimenter ce compte et ainsi d’acquérir des droits pour suivre une formation, bénéficier d’un temps partiel ou bénéficier d’un départ anticipé à la retraite (https://www.compteprofessionnelprevention.fr/home.html).

Les seuils associés aux facteurs de risques "travail de nuit" et "travail en équipes successives alternantes" sont abaissés respectivement de 120 à 100 nuits par an, et de 50 à 30 nuits par an.

L’acquisition de droits en cas de polyexposition est renforcée : désormais, le nombre de points acquis augmentera proportionnellement au nombre de facteurs de risques auxquels les salariés sont exposés.

Le barème de conversion des points pour les utilisations pour la formation et le temps partiel devient plus favorable : un point donnera le droit à un abondement du compte personnel de formation (CPF) de 500€ au lieu de 375€, et dix points permettront à tout titulaire d’un C2P de bénéficier de l’équivalent d’un mi-temps pendant quatre mois au lieu de trois mois jusqu’ici.

Par ailleurs, les titulaires d’un compte professionnel de prévention pourront, à compter du 1er septembre 2023, bénéficier d’un projet de reconversion professionnelle, sans perte de rémunération.

Renforcement de l’information des assurés sur le dispositif de retraite anticipée pour incapacité permanente

Afin d’améliorer le recours à ce dispositif, les bénéficiaires d’une rente AT-MP potentiellement éligibles à un départ anticipé seront désormais contactés durant l’année de leur 59 ans.

Un ensemble de dispositions réglementaires prévues par la réforme sont encore attendues. Elles devraient être publiées dans les prochaines semaines.

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