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Selon le rapporteur du Budget à l'Assemblée, il est "très peu probable" que la promesse d'Emmanuel Macron de baisser ces taxes soit inscrite dans le projet de loi de Finances 2024.

Avec la mise en place de son coûteux bouclier des prix de l’énergie à l’automne dernier, le gouvernement avait déjà décidé de reporter sine die la promesse d’Emmanuel Macron de baisser les droits de succession en 2023.
Près d’une année plus tard, avec une dette alourdie par la remontée des taux obligataires et un déficit plombé par le ralentissement économique, Bercy devrait avoir du mal à concrétiser cet engagement l’année prochaine.
La promesse coûterait à l’Etat 3 à 4 milliards d’euros, alors que l’une des priorités économiques affichées par l’exécutif est de redresser les comptes publics creusés par les mesures du "quoi qu’il en coûte".
D’après le rapporteur général du Budget à l’Assemblée nationale, le député Renaissance Jean-René Cazeneuve, son inscription dans le prochain projet de loi de Finances est ainsi « très peu probable », rapporte ce lundi 7 août Le Figaro. « Nous nous sommes engagés à baisser les impôts, mais à un rythme qui dépendra de la conjoncture économique […] Respecter notre trajectoire financière est un impératif », indique-t-il au quotidien.
Favoriser les successions en ligne indirecte
Lors de sa dernière campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait promis d’augmenter de 50.000€ l'abattement actuel pour les successions en ligne directe (parents-enfants), et d’instaurer un abattement de 100.000€ pour les successions en ligne indirecte (frères sœurs, neveux-nièce, beaux-enfants), une proposition beaucoup plus généreuse que le système actuel*, censée prendre en considération l’augmentation des prix immobiliers de ces dix dernières années et s’adapter aux modèles de familles recomposés.
La baisse des droits de succession est un sujet qui divise la classe politique. De fait, comme toutes les propositions de baisses d’impôt, la mesure bénéficierait d’un fort soutien populaire, largement bienvenu après une année teintée par les contestations sociales de la réforme des retraites.
Réclamée par la droite (Eric Ciotti, Sénat…), mais également poussée au sein des rangs de la majorité présidentielle (la ministre des Solidarités, ex-présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée, Aurore Berger, ainsi que le député Mathieu Lefèvre avaient été à l’origine d’un amendement dans le PLF 2023), elle semble pour l’heure difficilement compatible avec les ambitions de rigueur budgétaire réclamées par le président de la République à son nouveau gouvernement. Idéologiquement, en dépit de son adhésion populaire, la mesure est aussi délicate à introduire (en particulier l’augmentation de l’abattement en ligne directe à 150.000€), à une période de difficultés économiques qui touchent d’abord les plus démunis.
Qui paie des droits de successions en France ?
D’après Philippe Crevel, économiste et président du Cercle de l’Epargne, seulement la moitié des héritages en France sont aujourd’hui taxés. L’autre moitié y échappe grâce à l’exonération fiscale des 100.000€ et divers mécanismes d’optimisation fiscale, des leviers très utilisés par les ménages les plus riches, selon le Conseil d’analyse économique.
Quant aux donations entre vivants – qui bénéficient d’un abattement de 100.000€ tous les quinze ans pour celles réalisées en ligne directe – elles concernent une minorité de Français (18% des ménages en 2018 selon l’Insee) et sont aussi majoritairement peu ou pas taxées, dans la mesure où plus de 80% des donations ne dépassent pas 100.000€, et 87% sont réalisées entre parents et enfants.
*L’abattement des fratries par exemple s’élève aujourd’hui à 15.932€, celui entre oncle/tante et neveux et nièces est limité à 7.967€, celui des concubins tombe même à 1.594€ avant un impôt de 60%.
