Tribune de Guillaume Lombardo, gérant de Alta Conseil Finance.

Obtenir un crédit immobilier reste difficile aujourd’hui, en particulier pour les achats de résidences principales à cause de l’obstacle des seuils de l’usure qui pénalisent en particulier les emprunteurs de plus de 40 ans en raison du coût de leur assurance emprunteur. Le calcul désormais mensuel des seuils de l’usure a amélioré la situation mais cela ne résout pas tous les problèmes avec encore beaucoup de refus de prêts pour dépassement du taux d’usure. Voici 7 conseils pour améliorer son profil d’emprunteur ou pour contourner les seuils de l’usure.
Rappel sur ce qu’est le taux d’usure
Le taux de l’usure se définit comme le taux maximum légal que les établissements de crédit sont autorisés à pratiquer lorsqu’ils vous accordent un prêt. Fixé à la fin de chaque trimestre pour le trimestre suivant par la Banque de France, le taux de l'usure vise à vous protéger d’éventuels abus. Son calcul est provisoirement effectué chaque mois depuis janvier 2023.
Le taux d’usure correspond au TAEG maximum (Taux annuel effectif global) qu’une banque peut pratiquer en matière de prêt. En d’autres termes, il y a usure lorsque le TAEG d’un prêt est abusif et qu’il dépasse les seuils de l’usure en vigueur chaque mois.
Le TAEG comprend le taux d’intérêt de base (taux nominal), les commissions, frais et rémunérations diverses (frais de dossier ou frais de garantie exemple), sans oublier les primes d’assurance emprunteur qui peuvent peser lourd dans la balance. Si l'ensemble de ces éléments dépasse le seuil usuraire, le prêt est donc jugé illégal. Tout établissement de crédit qui va à l’encontre de celui-ci s’expose à des sanctions.
Pour les prêts d'une durée comprise entre 10 ans et moins de 20 ans, le taux d’usure de juin 2023 est actuellement fixé à 4,45%. Pour les prêts sur 20 à 25 ans, il est de 4,68%.
Se faire conseiller par un professionnel
Autant que possible, il faut se faire conseiller par un professionnel du courtage en prêts immobiliers car trouver des solutions pour passer sous les seuils de l’usure est beaucoup plus technique qu’il n’y paraît. Le courtier aura un effet de levier beaucoup plus important qu’un client particulier qui vient faire sa demande tout seul auprès des établissements bancaires, il disposera également d’un panel de banques très élargi qui permettra de trouver la plus adaptée à son profil. C’est donc l’expérience du courtier qui fera toute la différence dans la réussite de la demande du prêt immobilier version 2023.
Trouver le taux nominal le plus bas
Trouver la banque avec le taux nominal hors assurance le plus bas possible : cela peut ressembler à une évidence mais le point de départ est de trouver une banque avec le meilleur taux. Actuellement, une banque appliquant un taux de 4% sur 20 ou 25 ans sera désavantagée pour arriver à passer sous le taux d’usure par rapport à une banque proposant un taux de 3,60% à 3,80% sur 20 ans.
Délégation d’assurance
Demander à la banque une délégation d’assurance ou bien demander d’utiliser leur assurance emprunteur interne beaucoup moins chère que leur assurance groupe. En effet, certaines banques ont développé une offre d’assurance emprunteur "décotée" à tarif plus avantageux que leur assurance groupe afin de conserver leurs clients. Ce taux d’assurance peut par exemple passer de 0,36% à 0,16%, soit un écart de 0,20% qui peut largement faire la différence pour passer sous les plafonds de l’usure. Dans la pratique, cela se joue parfois à 0,01% près !
Frais de dossier et coût de la garantie
Les frais de dossier bancaires rentrent dans le calcul du taux d’usure. Si le taux d’usure est dépassé, certaines banques seront prêtes à baisser leur frais de dossier pour faire passer le TAEG sous le seuil légal. Idem pour les frais de garantie qui rentrent aussi dans le calcul du taux d’usure et qui sont variables d’une banque à une autre : soit la banque passe par l’organisme de caution Crédit Logement, soit elle passera par leur organisme de caution interne ou prendra une hypothèque ou privilège de prêteur de deniers.
Le coût de la garantie est proportionnel au montant du prêt mais dans l’ordre décroissant, la caution Crédit Logement coûte le plus cher, puis les cautions bancaires mutualistes et enfin le privilège de prêteur de deniers (PPD). Plus bas est le coût de la garantie, plus le TAEG sera faible et plus vous passerez sous le taux d’usure. Les banques pratiquant le Privilège de prêt de deniers sont donc à privilégier (sans jeu de mots).
Jouer sur le montant de votre apport et sur la durée du prêt
Vous l’avez compris, le calcul du taux d’usure est très technique. Il peut vous être conseillé de mettre beaucoup plus d’apport pour réduire la durée du prêt afin d’obtenir un taux plus bas et passer sous le seuil de l’usure.
Il peut s’agir par exemple de passer votre durée de prêt de 20 ans à 15 ans. Le seuil de l’usure de juin 2023 étant de 4,45% sur 15 ans contre 4,68% sur 20 ans, l’écart est de 0,23%. Si la banque interrogée a une grille de taux proposant une décote supérieure à 0,23% entre les prêts sur 20 ans et ceux sur 15 ans, cette démarche peut valoir la peine. Néanmoins, cela devient plus rare car les banques ont tendance à lisser leur taux de crédit entre 15 et 25 ans avec des différences beaucoup moins significatives qu’il y a quelques années.
Mon conseil favori est plutôt d’augmenter le montant du crédit et la durée du prêt. En effet, plus le montant du prêt est petit, plus l’impact des frais de dossier et de garantie sur le TAEG est important en proportion du montant du prêt octroyé (d’autant plus sur des montants de 100.000 à 200.000 €). J’ai donc tendance à demander aux banques d’augmenter le prêt de 20.000 à 30.000 € pour passer sous le taux d’usure. Tout cela en veillant à ne pas trop augmenter la durée du crédit au-delà de 20 ans pour des emprunteurs de 40 à 50 ans car le taux d’assurance augmente aussi avec l’âge.
Demander un taux variable
Le taux d’usure sur les taux variables est de 4,47% (barème juin 2023) alors que sur les taux fixes sur une durée de prêt au-delà de 20 ans il est de 4,68%. La différence est donc de 0,21%. Si votre banque peut vous octroyer un taux variable plus avantageux de 0,21% par rapport au taux fixe proposé alors vous aurez un avantage compétitif pour passer sous le seuil de l’usure. Cette solution n’est pas à exclure mais attention aux taux variables car s’ils ne sont pas capés sur un taux maximal, la variation du taux à la hausse sur les années à venir pourra provoquer une hausse des mensualités. Il faudra alors contacter idéalement un courtier pour le repasser en taux fixe.
Passer son dossier en SCI
Le taux d’usure est appliqué pour protéger les particuliers mais dans le cas d’un achat en société (type SCI, SARL de famille…), votre dossier sera considéré comme un dossier professionnel car vous achetez en tant que personne morale et non en tant que particulier. Le taux d’usure ne sera donc pas applicable. Cette solution s’applique pour de l’investissement locatif mais elle peut être aussi utilisée pour un achat en résidence principale, justement avec l’objectif de faire passer son dossier sous le taux d’usure. Dans ce cas aussi, passer par un courtier en prêts immobiliers est essentiel car toutes les banques n’appliquent pas la même approche et ne considèrent pas toujours que la demande de prêt via une SCI puisse être considérée comme un dossier de type professionnel.
