Recentrage du PTZ : ce que prévoit le gouvernement

Recentrage du PTZ : ce que prévoit le gouvernement

Annoncé en juin par la Première ministre, ce recentrage devrait exclure les maisons individuelles du dispositif. Mais le projet du gouvernement est encore loin d'être acté.

Recentrage du PTZ : ce que prévoit le gouvernement
Crédit photo © iStock

Renouvelé pour la période 2024-2026, le prêt à taux zéro ne disparaîtra pas l’année prochaine. Mais pour des raisons budgétaires, le gouvernement entend réduire fortement la portée de ce dispositif déjà raboté en 2018. Un recentrage qui devrait permettre à l’Etat de récupérer à terme quelque 2,3 milliards d’euros.

Dans son exposé des motifs accompagnant le projet de loi de Finances, toutefois, le gouvernement ne reprend pas l’argument financier, mais justifie le recentrage du PTZ afin d’en « renforcer l’efficacité et limiter son impact en matière d’artificialisation des sols et d’étalement urbain ».

Les maisons neuves exclues du dispositif

Ce sera nécessairement un coup de massue supplémentaire pour le secteur du logement neuf. Annoncé par l’Etat dès juin à la restitution des travaux du Conseil national de la refondation sur le Logement, l’exclusion des maisons individuelles neuves du champ d’éligibilité du prêt à taux zéro (PTZ) est bien inscrite dans la mouture initiale du projet de loi de Finances.

Le texte prévoit, comme annoncé au printemps par la Première ministre, de recentrer le PTZ sur les logements collectifs (neufs) en zones tendues (A, Abis, B1) et les logements anciens en zone détendue (B2,C) sous condition de réalisation de rénovation. Pas d’inquiétude en revanche pour les programmes de location-accession à la propriété immobilière, le bail réel solidaire ou l’accession sociale à la propriété dont l’éligibilité sera maintenue.

Si la mesure survit à l’étape parlementaire, son impact sur le nombre de PTZ accordés ne sera pas à la marge, puisque le PTZ est actuellement le principal outil d’accession à la propriété dans le neuf. 33.000 maisons individuelles ont été financées par un PTZ l’année dernière, représentant un peu plus de la moitié de ce type de prêts accordés en 2022, et pour un montant d’emprunt moyen proche de 47.000€.

Le PTZ est par ailleurs un outil puissant de solvabilité des ménages, puisqu’il permet aux primo-accédants de bénéficier d’un différé de remboursement (hors prêt bancaire), à une période où les normes de construction, la hausse du prix des matériaux et du foncier ont fortement gonflé les tarifs des programmes neufs.

Biens avec travaux : des conditions de performance énergétique à prévoir

L’initiative fait sens avec les objectifs ambitieux de rénovation du parc de logement français, mais elle sera nécessairement une difficulté supplémentaire à l’éligibilité des dossiers d’emprunt. Actuellement, et depuis 2018, le PTZ dans l’ancien est réservé aux biens sous la condition de réaliser un budget de travaux à hauteur d’un tiers du prix d’acquisition, mais sans obligation associée d’amélioration de performance énergétique.

Une condition que prévoit le PLF 2024, qui souhaite que ces travaux d’amélioration permettent « d’atteindre un niveau de performance énergétique défini par arrêté ». Dans le même esprit, le projet du gouvernement prévoit par ailleurs d’exclure « le coût des travaux portant sur l’installation d’un dispositif de chauffage fonctionnant aux énergies fossiles » du coût total de l’opération sur la base duquel est défini le montant du PTZ

Un barème plus favorable ?

Bien conscient de priver ainsi une partie des ménages de la source de financement de leur projet immobilier, le gouvernement a finalement décidé, pour compenser, de réviser le barème des plafonds de ressources du PTZ, fixés selon la zone où se situe le bien immobilier et la composition du foyer. « Je propose que nous révisions le barème du PTZ pour qu’il y ait plus de jeunes ménages qui puissent y avoir accès et que nous revoyons les critères pour créer plus de flexibilité », a ainsi déclaré le ministre de l’Economie et des Finances dans un entretien avec des lecteurs du Parisien paru le 27 septembre.

Mais ledit barème ne figure pas dans le projet de loi de Finances, car les plafonds sont fixés chaque année par décret, et aucune précision n’a été apportée sur les contours de cette révision. Il est possible de faire rapidement évoluer le PTZ, y compris dans le PLF si les parlementaires le souhaitent », a-t-il déclaré.

La révision pourrait également concerner le zonage du PTZ, a par ailleurs expliqué Bruno Le Maire face à la commission des finances de l’Assemblée nationale la semaine dernière, alors que plusieurs membres de la commission (MoDem, PS, Divers Gauche) se sont déclarés contre ce recentrage ou en faveur d’une révision du zonage, lequel a d'ailleurs été depuis modifié par un arrêté paru au Journal officiel du 3 octobre.

Ce reclassement "flash", pour reprendre l'expression du gouvernement, concerne plus de 200 communes, dont 154 intégrant la zone tendue, rendant ces dernières désormais "éligibles" à des programmes de logement "intermédiaire" ainsi qu'au PTZ dans la version "2024" proposée par le gouvernement.

L’étape parlementaire à ne pas négliger

Le projet en l’état, donc, demeure encore loin d’être acté. La proposition du gouvernement évoluera nécessairement et devra trouver suffisamment de soutien parlementaire dans un contexte particulièrement tendu. La hausse des taux d’intérêt et la correction des prix de l’immobilier ont remis un coup de projecteur sur la crise du logement, lancinante depuis plusieurs années déjà.

Chute de la production, attentisme des acheteurs, capacités d’emprunt amoindries, tarissement de l’offre locative, saturation du parc social, calendrier exigeant de rénovation des passoires énergétiques… un empilement exceptionnel de situations critiques a été observé cette année. Une crise massive qui touche aujourd’hui tous les acteurs du logement et qui devrait se traduire par une masse de requêtes de tous bords parlementaires.

Déjà l’an dernier, des amendements au PLF 2023 avaient tenté de raboter le PTZ en le supprimant des zones rurales et éloignées des grandes agglomérations (B2, C). Sans succès. Sur ce dossier, encore une fois, la levée de bouclier devrait être forte, car cette restriction s’accompagne d’une autre pilule difficile à faire passer pour le secteur qu’est la suppression définitive du Pinel.

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