« Dette publique : le risque d’avalanche ! »

« Dette publique : le risque d’avalanche ! »
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Tribune de Grégory Leclerc, président de Prudentia Patrimoine.

« Dette publique : le risque d’avalanche ! »
Crédit photo © Prudentia Patrimoine

Comme chacun le sait, les normes comptables internationales (notamment le Traité de Maastricht) prévoient de présenter la dette publique, à sa valeur nominale, en pourcentage du PIB. Et il est fait de même pour le déficit annuel des comptes publics.

Ainsi, en ce qui concerne la France, notre dette représente désormais 112,5% de notre PIB. Et le déficit prévisionnel pour 2023 s’élèverait à près de 5% du PIB.

Mais cette méthode de présentation peut avoir pour effet d’engendrer une mauvaise appréciation de la situation par les Français eux-mêmes et de leur masquer ainsi l’ampleur du désastre… En effet, rappelons que le PIB représente la somme des richesses créées dans le pays, secteurs public et privé confondus, et non les recettes encaissées par l’Etat.

Or, c’est bien le budget de l’Etat qui doit lui permettre de payer la charge de sa dette (les intérêts), chaque année, et (tenter) de rembourser la dette accumulée. Sauf à accroître encore la ponction réalisée sur le budget des ménages et des entreprises. Mais nous atteignons de tels taux de prélèvements obligatoires que, comme le démontre la célèbre "courbe de Laffer"*, tout accroissement des taux d’imposition risquerait d’aboutir à un amoindrissement des recettes fiscales.

35% de hausse de la dette publique en six ans

En valeur, la dette publique représente plus de 3.000 milliards d’euros de dette cumulée et près de 160 milliards de déficit pour la seule année 2023. En six ans, de 2017 à 2023, la dette publique est passée de 2.252 milliards à 3.013 milliards, soit 35% d’augmentation.

En se focalisant sur le seul périmètre du budget de l’Etat (hors sécurité sociale, organismes d’administration centrale et collectivités locales), les dépenses totales 2023 sont prévues pour 682 milliards d’euros pour des recettes s’élevant à … 516 milliards, soit 166 milliards de déficit !

Cela signifie que notre Etat est en déficit de 32% par rapport à ses recettes. Vu sous cet angle, la situation est bien plus désastreuse encore.

Une charge de la dette accrue par la remontée des taux

Et le pire est à venir car, sous l’effet de la hausse des taux d’intérêt que nous connaissons depuis 18 mois, la charge de la dette (les intérêts payés chaque année) va exploser.

De 2009 à 2020, le cumul de notre dette a doublé. Et pourtant, dans le même temps, les intérêts payés chaque année ont diminué de moitié. Mais en 2021 puis en 2022, la charge de la dette s’est accrue de 5,5 milliards puis de 15 milliards, principalement en raison de l’impact des obligations indexées sur l’inflation.

Et avec les taux d’intérêt (taux auxquels emprunte la France) qui sont passés en quelques mois de 0 à 3%, la charge de la dette risque d’augmenter de 30 milliards par an. A titre indicatif, 30 milliards c’est aussi le budget annuel du ministère de l’intérieur…

Au lieu de profiter de la baisse des taux d’intérêt pour nous désendetter, les gouvernements successifs ont accru le montant de notre dette, en dépensant toujours plus, et nous faisant courir aujourd’hui un grave danger du fait de la remontée des taux.

Vers une augmentation annuelle de plus de 30 milliards d’euros

Explications : la durée de vie moyenne de la dette de la France est d’environ 8 ans, pour un encours de dette dite "négociable" de 2.350 milliards (dette de l’Etat seulement). Le taux d’intérêt « moyen » de la dette française était de 1,8% à fin 2022.

Chaque année, environ 300 milliards de dette (2.350 milliards/8 ans) vont ainsi devoir être renouvelés par la France et, si les taux restent aux environs de 3%, à un coût marginal supplémentaire de 1,2%.

Et comme dans le même temps, la dette de le France risque de passer de 3.000 milliards à 3.500 milliards du fait du maintien d’un déficit élevé, cela engendrerait alors au bout de huit ans une augmentation annuelle du coût de la dette de plus de 30 milliards et ce, chaque année !

Tout ceci ne serait pas dramatique si la dette de la France était détenue par les Français eux-mêmes. Malheureusement, à plus de 50%, notre dette est détenue par … des étrangers. Préparez-vous à sortir le chéquier !!

*La courbe de Laffer (du nom de l'économiste américain Arthur Laffer, né en 1940) tend à démontrer que l'accroissement des taux d'imposition se traduit, au-delà d'un certain seuil, par un amoindrissement des recettes fiscales.

©2023
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Grégory Lecler

Le parcours de Grégory Lecler

Président Fondateur, Prudentia Patrimoine

Grégory Lecler est diplômé du DESS de Droit du Patrimoine Professionnel de l’Université Paris-Dauphine, titulaire du Titre d’Ingénieur-Maître spécialisé en Gestion de Patrimoine décerné par l’Université Paris-Dauphine. Après une expérience réussie au sein d’un grand établissement bancaire parisien en qualité de Gérant de Fortune Senior, Grégory Lecler a fondé son cabinet, Prudentia Patrimoine en 2006 et développé une expertise reconnue dans le conseil et la gestion de patrimoine en plaçant l’écoute, la rigueur professionnelle et l’éthique au cœur de son activité.