« Remake Live fait partie des SCPI récentes, donc moins exposées au risque de baisse des valeurs d’expertise »

« Remake Live fait partie des SCPI récentes, donc moins exposées au risque de baisse des valeurs d’expertise »

Interview de Nicolas Kert, Président de Remake, dont il est co-fondateur depuis 2021.

« Remake Live fait partie des SCPI récentes, donc moins exposées au risque de baisse des valeurs d’expertise »
Crédit photo © Remake

De nombreuses SCPI ont baissé le prix de leur part depuis quelques mois, ce n'est pas le cas de Remake Live qui au contraire a augmenté le prix de la sienne. Mais y a-t-il un risque d'être rattrapé par le contexte actuel ?

Tous les acteurs sont touchés par la baisse des prix de l'immobilier, y compris les fonds les plus récents comme Remake Live, mais de façon beaucoup plus modeste que ceux qui ont investi avant 2022. Du fait de notre création récente et d’une collecte importante, plus de 330 millions d’euros, nous pouvons saisir des opportunités dans un marché désormais moins compétitif et où les prix continuent de refluer rapidement. Notre stratégie d’acquisition opportuniste, à la fois géographique et sectorielle, permet d’orienter rapidement les investissements là où nous pensons que les conditions de marché sont les meilleures. Et ainsi constituer le portefeuille de Remake Live sur la base de taux de rendement immobilier plus élevés qu’il y a quelques trimestres, et ce sans porter le fardeau d’actifs acquis avant 2022. A 7,64%, Remake Live a affiché pour sa première année le meilleur taux de distribution du marché des SCPI. En 2023, ce taux devrait atterrir autour de 7,50%, au-delà de l’objectif long terme de 5,4% envisagé (TRI cible 10 ans de 5,9%). Rappelons que ces rendements ne sont que le reflet des nouvelles conditions des marché immobiliers en Europe.

Les SCPI les plus anciennes sont donc les plus exposées...

Pas nécessairement les plus anciennes, mais celles dont les collectes se sont surtout réalisées pendant que les taux étaient bas. Cela entraine plusieurs effets, à commencer par des investissements réalisés alors que les taux étaient très bas, et donc davantage exposés à la remontée des taux actuelle (et par voie de conséquence, des baisses de valeurs de parts). Les investisseurs ont aussi des prix de revient plus élevés avec des taux de distribution potentiels plus bas, donc une compétitivité de leur investissement qui questionne par rapport aux taux actuels servis par des placements alternatifs.

Ce qui importe donc, selon nous, c’est la proportion du passif de la SCPI entré entre 2016 et 2022, moment où les taux étaient très bas. L’enjeu pour ces fonds est de pouvoir collecter de nouveau pour accélérer la transition du portefeuille vers des rendements immobiliers plus élevés. En attendant, pour certaines SCPI, la performance affichée pour un nouveau souscripteur n’est plus suffisante, ce qui pose rapidement la question de la liquidité.

Comment faire face aux retraits des clients ?

La liquidité est un enjeu central pour les SCPI. Liquidité qui est assurée en pratique par les nouveaux entrants. En l’absence de souscriptions, les retraits deviennent impossibles. La SCPI devient donc illiquide. Pour y mettre fin, deux solutions palliatives existent. D’abord, le fonds de remboursement que peut constituer chaque SCPI par la vente d’actifs ou via la mise en réserves des résultats courants. Rien d’obligatoire mais la formule peut comporter des limites car le montant est à la fois réduit en pratique, et il peut poser des questions de traitement équitable des sortants. Deuxième solution, le marché secondaire, un marché où se confrontent des ordres de vente et d’achat. Son ouverture engendre généralement des décotes importantes par rapport au prix de retrait, mais c’est le prix de la liquidité. In fine, la liquidité d’une SCPI est liée à sa performance : une SCPI qui délivre une performance relative supérieure à d’autres placements est une SCPI compétitive, donc souscrite, et donc liquide. Les SCPI qui maintiennent leur liquidité sont généralement celles qui offrent aujourd’hui des taux de distribution bien supérieurs à 5% et moins de risques en termes de valeur, par exemple si leur patrimoine a été récemment acquis. Pour les autres, le retour à la liquidité passera probablement par une baisse des prix. Une baisse qui a déjà débuté.

Les baisses de prix de part vont-elles se poursuivre selon vous ?

Il y a des probabilités que d’autres SCPI soient amenées à baisser le prix de leurs parts, une fois les expertises immobilières de fin d'année réalisées. Ce décalage entre la perception du marché, en baisse très nette depuis 12 mois, et l’inertie avec laquelle les SCPI corrigent s’explique en partie par les délais de transaction longs (en France et en Allemagne notamment) qui tardent à faire ressortir les nouveaux prix. De plus, le principe de valorisation des immeubles en rythme annuel pour les SCPI, ainsi que la validation des nouvelles valeurs par l’assemblée des associés plusieurs mois après, rajoutent un délai supplémentaire. C’est la raison pour laquelle l’AMF a souhaité cet été, dans un marché qui décale rapidement, que les sociétés de gestion s’assurent que le prix de souscription de leur SCPI se situe toujours bien dans le tunnel réglementaire de + ou - 10% de la valeur de reconstitution en date du 30 juin 2023. Le réexamen des valeurs d’immeubles a, sans surprise, amené certaines SCPI à abaisser leur prix pour se conformer à ce principe. Chez Remake, nous sommes favorables à un réexamen à mi-année, d’autant plus quand l’environnement est chahuté.

Les baisses de prix de parts qui se multiplient sont-elles de nature à une aversion des investisseurs pour les SCPI ?

On rappelle tout d’abord que les baisses de prix sont dans l’immense majorité le fait de la remontée des taux. Nous ne sommes donc pas face à une crise immobilière, mais bien financière. Par ailleurs, après dix ans de croissance continue des prix, les investisseurs avaient perdu de vue que l’immobilier pouvait, lui aussi, afficher des performances négatives. Cet épisode le montre. Pourtant, le modèle des SCPI mérite d’être rappelé : l’essentiel de sa performance historique très long terme est tiré des revenus locatifs, et moins de la valeur. Si l’investisseur garde en tête que son horizon d’investissement est de 10 au moins, les revenus parviendront dans la plupart des cas à contrebalancer des mouvements de prix sur la période. Pour les investisseurs indécis, la performance comparée des SCPI par rapport aux autres placements, et l’assurance que les prix reflètent désormais les valeurs de marché, seront les signaux pour un solide redémarrage.

Les SCPI ont, malgré tout, une certaine latitude pour fixer le prix de leur part au sein de la fourchette -10%/+10% du prix de reconstitution... Quelle est la meilleure politique en la matière ?

Une méthode neutre consiste à fixer le prix de la part à la valeur de reconstitution après expertise. C'est le cas de Remake Live. Deuxième possibilité : émettre en bas de la fourchette de -10%/+10%, de façon à inciter à la collecte par le biais d'un rendement plus élevé. Enfin, troisième possibilité : placer le prix de la part en haut de fourchette de façon à ralentir la collecte avec un rendement moins incitatif. Ce peut être le cas en période de difficulté à investir.

Dans ce contexte, la stratégie d'acquisition opportuniste de Remake va-t-elle se poursuivre ?

Remake Live fait partie des SCPI récentes, donc moins exposées au risque de baisse des valeurs d’expertise. Qui plus est, la diversification à la fois sectorielle et géographique permet à la SCPI d’aller saisir les opportunités d’investissement là où nous considérons que les marchés corrigent le plus fort. L’Europe du Nord par exemple, a été en avance de cycle sur la France ou l’Allemagne. Les acheteurs y ont été moins nombreux et les prix ont rapidement corrigé, ce qui a fait naître des opportunités d’investissement que nous avons largement capturé en Irlande notamment. A contrario, nous évitons les thématiques à la mode, la logistique ou la santé, où les liquidités sont trop présentes selon nous. Nous revenons désormais en France, puisque les acteurs ont désormais acté une baisse des prix. Mais le dénominateur commun reste la qualité du foncier et le sérieux de la signature du bail.

©2023
L'Argent & Vous
Nicolas Kert

Le parcours de Nicolas Kert

Président et co-fondateur, Remake Asset Management

Nicolas Kert est Président de Remake, dont il est co-fondateur depuis 2021. Nicolas a débuté sa carrière chez Generali Immobilier en 1999 en tant que Responsable du Fund Management puis rejoint Amundi Immobilier en 2006. Il y occupe pendant 10 ans différentes responsabilités, notamment en tant que Directeur des fonds dédiés à la clientèle Particuliers. En 2016, il intègre Swiss Life Reim pour prendre la direction des fonds grand public. En 2018, il rejoint Novaxia Investissement en tant que Directeur Général puis Président de la société de gestion. Âgé de 46 ans, il est titulaire d’une maîtrise d’économie et d’un Master d’ingénierie immobilière.

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