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Si l’assurance vie a perdu un peu de son éclat cette année, rien ne semble en revanche arrêter les Plans d’épargne retraite (PER).

En dépit du contexte d’inflation et de marchés boursiers en demi-teinte, les ménages ont continué d’alimenter fortement leurs plans cet été. Au contraire de l’assurance vie, dont la collecte est restée en berne en juillet et en août, impactée par de moindres cotisations et des prestations de plus en plus élevées, l’encours du PER a poursuivi sa croissance à un bon rythme cet été.
Pour les seuls produits assurantiels, les cotisations sur ces plans ont enregistré une croissance de de 15% en juillet et de 27% en août par rapport à l’année dernière, avec quelque 102.500 nouveaux assurés (hors transfert d’anciens contrats) durant ces deux mois, selon les données de France Assureurs, la fédération française de l’assurance.
Près de 7,5 millions de plans ouverts
Le succès des PER, dispositif créé par la loi Pacte en remplacement d’un panel d’anciens contrats retraites, a été immédiat depuis sa commercialisation fin 2019, et ne s’est jamais démenti depuis. Une réussite que le ministère de l’Economie ne manque pas de rappeler régulièrement, alors que son objectif initial, qui était d’obtenir 3 millions de plans ouverts à fin 2022, a été rapidement dépassé, le marché en comptant déjà plus du double à cette période.
Moins d’un an plus tard, au 3 octobre, « 7,4 millions de Français ont ouvert un plan d’épargne retraite pour un encours de 85 milliards d’euros », s’est félicité cette semaine Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances, lors d’une intervention tenue aux Assises de l’Afer, rendez-vous annuel de la principale association d’épargnants en assurance vie et retraite.
Dans son discours, M. Le Maire a expliqué cet engouement par la « simplicité du dispositif fiscal, le plus avantage possible à la sortie », ainsi que la liberté laissée aux titulaires en la matière « entre disposer d'un capital ou au contraire avoir une rente », là où les anciens PERP n’offraient par exemple qu’une possibilité de sortie en capital limitée (à hauteur 20% de la valeur constituée).
« Je crois à la liberté des épargnants, à la justesse de leurs choix et je pense que leur laisser la liberté de décider par eux-mêmes ce qu'ils veulent faire avec un accompagnement fiscal approprié, c'est la meilleure façon de faire marcher un produit d'épargne », a-t-il déclaré.
La déductibilité des revenus, l'arme fiscale du PER
De fait, l’épargne retraite a gagné en simplicité et en lisibilité. Un panel de solutions plus ou moins connues au fonctionnement hétéroclite et plutôt rigide (article 83, PERP, Madelin…) ont été supprimées en lieu et place d’un unique dispositif, décliné sous deux formes (assurantielle, avec fonds euros, très majoritaire, et bancaire, en titres uniquement), et proposé en version individuelle comme en plan collectif, via l’épargne d’entreprise.
« Le PER a bien rencontré son public d’épargnants car toutes les contraintes qui pesaient sur les anciens dispositifs, notamment les Madelins et les PERP, ont été supprimées. Le choix du type de sortie à la retraite, en particulier, est une option séduisante pour les Français qui sont particulièrement férus de capital », observe Alexandre Boutin, directeur de l’ingénierie patrimoniale de Primonial Ingénierie & Développement, spécialisé dans la gestion d’actifs et patrimoniale.
Mais l’avantage fiscal offert par le PER reste la principale raison de son succès.
« L’optimisation de la fiscalité repose sur deux principaux mécanismes qui cohabitent : le premier est de jouer sur l’assiette, en la réduisant, et le second est de recourir à la réduction ou au crédit d’impôt, rappelle Alexandre Boutin, et le PER est le premier outil pour diminuer l’assiette de l’impôt » puisque ses versements volontaires sont déductibles du revenu imposable de l’épargnant, jusqu’à un certain plafond, assez généreux, lequel n’entre pas dans le plafonnement des niches fiscales.
Dans le contexte de réforme des retraites, allongeant la durée de cotisation des travailleurs, et d’un pouvoir d’achat contraint par l’inflation, qui a rendu les ménages très attentifs au niveau actuel de leurs revenus, rien de très étonnant donc que ces plans d’épargne aient continué de séduire cette année.
La défiscalisation des revenu est l'atout dans la manche du PER dont l'assurance vie ne dispose pas, qui lui a permis de résister face à la concurrence de l’épargne réglementée (rémunérée pour encore près d'un an et demi à 3%), et à des unités de compte pénalisées par des marchés actions peu porteurs. Avec des possibilités de déblocage plus restreintes par ailleurs (achat de la résidence principale uniquement, ou "accidents de la vie"), ces produits encore récents subissent aussi beaucoup moins le phénomène structurel de la hausse des prestations qui impacte l’assurance vie (décès et départs en retraite en constante progression).
Développement de l'offre et promesses du fonds euros
La demande dynamique pour ces produits a en outre entraîné les distributeurs à soigner leur offre pour séduire un public large, en proposant de nouveaux contrats aux frais limités (le secteur avait été rapidement épinglé pour des pratiques tarifaires abusives), des portefeuilles plus larges en termes d’actifs, de thématiques ou de gestion de risque.
Comme chez Inter Invest par exemple, dont le plan d’épargne retraite est désormais proposé pour les contrats en gestion pilotée en capital garanti à l’échéance (par certification BNP Paribas). Ou du côté du Goodvest, plateforme en ligne spécialisée dans l’épargne responsable, qui vient de lancer un PER assuré par Generali incluant un mandat d’arbitrage entièrement aligné avec les objectifs de l’Accord de Paris.
La hausse des taux, enfin, devrait aussi jouer en leur faveur alors que les assureurs ont remis au centre de leur stratégie de collecte les fonds en euros avec l'objectif de renouveler rapidement le stock de leurs vieilles obligations. Si dans les premiers temps, les poches sécurisées des PER avaient été assez négligées, la donne avait déjà changé pour la distribution de performance au titre de 2022. Plusieurs acteurs du marché, qui avaient servi pour les fonds euros de leurs PER des rendements inférieurs à ceux de l’assurance vie en 2021, avaient finalement aligné la performance de leurs deux produits en 2022. Un effort qui est promis à se poursuivre cette année…
