« La prochaine baisse de taux sera ultra-porteuse pour le cours de l'or »

« La prochaine baisse de taux sera ultra-porteuse pour le cours de l'or »

Balancé entre la concurrence des obligations souveraines et des périodes de forte aversion au risque, l’or demeure-t-il un investissement de couverture pertinent ?

« La prochaine baisse de taux sera ultra-porteuse pour le cours de l'or »
Crédit photo © iStock

Principalement utilisé comme actif de couverture, et considéré comme une protection contre l’inflation, voici près de deux années que le cours de l’or fait face à des vents contraires.

Les taux élevés, une concurrence redoutable pour l’or

Plébiscité d’un côté lors d’épisodes de forte aversion au risque, le métal jaune a été d’autre part fortement concurrencé par les obligations d’état, dont les rendements ont retrouvé des niveaux qu’ils n’avaient pas atteint depuis plus de quinze ans.

Face à des Treasury Yields américains à 10 ans qui ont frôlé les 5% de rendement ces dernières semaines, avec des taux réels (nominal net d’inflation) autour des 2,4%*, à un point haut de plus de dix ans, l’or, qui « n’est que ce qu’il est, et ne distribue pas de dividendes », rappelle Franck Languillat, directeur général et gérant du fonds FDC Or Physique de Financière de la Cité, a eu du mal à faire le poids.

« A de tels niveaux de rendement, les investisseurs se sont logiquement tournés vers les placements obligataires au détriment de l’or. Pour autant, en dépit de ce contexte de taux élevés, son cours reste plutôt bien orienté car les conflits internationaux – la guerre en Ukraine, et maintenant la situation en Israël lui ont offert de belles phases de remontée », explique-t-il.

Une performance « exemplaire » sur cinq ans

Plus de 8,5% de hausse à date depuis le 1er janvier, plus de 12,5% sur une année glissante, 5% en revanche sur trois années mais plus de 60% de progression sur cinq ans. Inégale selon les périodes, la performance de l’or reste au beau fixe à moyen terme.

« Sur cette phase de marché de cinq années, le parcours de l’or a été assez exemplaire en dollars, même si l’essentiel de la hausse s’est produit, lors d’une première phase entre novembre 2018 et juillet 2020, et que depuis, plusieurs périodes de consolidation ont été observées », constate Franck Languillat.

« Depuis plusieurs mois, le cours de l’or était dans une forme d’incertitude, commente pour sa part Jean-François Faure, président-fondateur d’Aucoffre.com. Les faillites d’établissements bancaires américains, ainsi que la chute du Crédit Suisse, qui ont fait planer des craintes de défaillance systémique, ont permis à son cours de passer au-dessus des 2.060$ l’once au printemps dernier et de ne pas redescendre en deçà des 1.950$ jusqu’à la fin du mois de mai. Mais ces inquiétudes levées, et la guerre en Ukraine ayant par ailleurs été "digérée" par les marchés, l’or est ensuite bien redescendu, toujours concurrencé par des rendements obligataires élevés et sans certitude sur l’horizon de leur inflexion », explique-t-il.

Nouveau record en euros

« Puis cet événement absolument imprévisible de l’attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre a de nouveau fait rebondit le cours de l’or… » La violence des événements dans cette zone particulièrement sensible, ses répercussions politiques et géostratégiques, ont bien sûr fait automatiquement grimper le métal précieux… mais aussi le dollar en tant que valeur refuge.

Conséquence : le prix de l’or a surtout fortement progressé en euros atteignant un record historique dans cette devise frôlant les 1.900€ le 29 octobre, « ce record pouvant par ailleurs être perçu comme un indicateur avancé assez intéressant d’un affaiblissement de la monnaie européenne », relève Jean-François Faure.

Après ce climax, la correction qui s’en est suivie a été assez franche, renvoyant le métal dans l’ombre des rendements obligataires. En euros, l’or a décroché de presque une centaine d’euros en à peine quinze jours. En dollars, la correction, moins violente, s’est traduite par une perte d’un peu moins de soixante-dix dollars. Jusqu’à retrouver un petit peu d’air ces derniers jours, passé de 1.955$ environ à 1.990$ ce vendredi, suite à la publication, mercredi, des chiffres de l’inflation américaine pour le mois d’octobre.

Fin de cycle en vue, pari gagnant pour l’or ?

Moins élevée qu’attendue, cette inflation dessine pour les analystes un potentiel statu quo de la Fed pour sa réunion du mois de décembre, et la fin, projetée depuis de long mois déjà, de la remontée des taux courts. Un terrain qui serait ainsi favorable au cours de l’or à court terme, mais aussi possiblement à moyen terme.« Incontestablement, la prochaine baisse de taux sera ultra-porteuse pour le cours de l’or car elle marquera la fin d’un cycle haussier exceptionnel par sa rapidité et sa violence », considère Jean-François Faure.

Notamment si la Fed décide d’ici quelques temps, « par exemple en 2025 », de remonter sa cible d’inflation, à 2,5% « voire à 3% », avance Franck Languillat. « Quand on accepte plus d’inflation, on accepte finalement que la monnaie se déprécie un peu plus vite qu’auparavant. Donc pour l’or, cela signifie que sa contrevaleur en devises va augmenter, tout simplement », rappelle-t-il.

« Il est toujours difficile de réaliser des projections de cours sur cet actif très singulier, mais nous considérons qu’il revêt aujourd’hui un bon potentiel de valorisation. Pour les investisseurs, particuliers comme institutionnels, disposer d’or en fonds de portefeuille comme actif de couverture nous apparaît toujours aussi pertinent », déclare le spécialiste.

*Rendement de l’US.10 Year TIPS.

Comment investir ?

Il existe plusieurs façons d'investir dans le métal jaune, soit en achetant directement de l'or physique, sous différentes formes (pièces, lingots, bijoux...), par le biais de boutiques spécialisées ou de plateformes en ligne (comme Aucoffre.com..), soit en passant par des instruments financiers adossés à l'or en tant que sous-jacent (ETC, certificats, fonds, CFD...), fonds ou titres de sociétés minières aurifères, qui ont pour principal avantage d'éviter la problématique du stockage. Avec d'autres inconvénients : vous n'êtes pas propriétaire directement de l'or, et ces véhicules n'offrent que rarement une assurance complète contre le risque de contrepartie, en dépit de la grande liquidité de cet actif. Les frais (de gestion, d'entrée et de sortie) peuvent en outre être relativement élevés.

A noter que le fonds professionnel FDC Or Physique de La Financière de la Cité est le seul instrument fonds du marché français à procurer aux investisseurs la propriété pleine et entière de l'or, dont BNP Paribas est le dépositaire (l'or physique du fonds étant stocké dans les coffres d'HSBC à Londres). Son ticket d'entrée, assez élevé, est abaissé pour les épargnants ayant déjà investi dans un fonds d'investissement alternatif (FIA).

Quant à l'achat d'or physique, attention aux problématiques de conservation (usage du métal...) et de stockage (sécurité, assurance antivol...) et de traçabilité de l'or. Les acteurs en ligne, comme Aucoffre.com, proposent notamment leurs propres services de stockage sécurisés.

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