
Matthieu Grouès Associé-gérant chez Lazard Frères Gestion
“Les bonnes performances des valeurs les plus cycliques depuis le début de l'année reposent sur des scénarios optimistes
Boursier.com : Comment se porte l'économie des Etats-Unis ?
M.G. : Alors que l'économie américaine présentait plusieurs signes de basculement au printemps, l'activité reste solide. Cette résistance est liée notamment à la consommation des ménages... Nous considérons malgré tout que l'activité économique aux Etats-Unis présente des signes de fragilité. On observe une nette décélération du taux d'embauche. Le matelas d'épargne constitué par les ménages durant le Covid est en train de s'épuiser. Le rebond récent de la construction résidentielle semble fragile dans un environnement de hausse des taux. La décélération du crédit est d'une ampleur qui a toujours correspondu à des récessions...
Boursier.com : Quelle est la situation de l'Europe ?
M.G. : Les enquêtes d'activité se sont nettement dégradées durant l'été et sont maintenant cohérentes avec une contraction de l'activité. Le choc de pouvoir d'achat dans un contexte inflationniste et le resserrement monétaire semblent être en train de faire basculer l'économie de la zone euro en récession.
Boursier.com : Dans ces conditions, quelle attitude doit-on adopter sur les actions ?
M.G. : Les perspectives économiques incitent à la prudence sur les marchés actions. Les bonnes performances des valeurs les plus cycliques depuis le début de l'année reposent sur des scénarios optimistes. La valorisation des technologiques américaines semble excessive, elle est supérieure à la période post-Covid... La prime de risque du marché américain est très faible et offre peu de marge de sécurité aux investisseurs. Les anticipations relatives aux résultats d'entreprises pour l'année prochaine voient des hausses d'environ 10%, alors que les récessions causent généralement des baisses de plus de 20%...
Boursier.com : Que préconisez-vous ?
M.G. : Nous sommes prudents sur les actifs risqués. Pour autant, les opportunités persistent, notamment en Europe où les valorisations restent raisonnables, en particulier sur le segment des small caps. Les entreprises bénéficiant d'un fort pricing power disposent d'un avantage compétitif majeur dans la période actuelle.
Boursier.com : Qu'en est-il du crédit ?
M.G. : Nous privilégions les obligations d'entreprises de bonne qualité. Les fondamentaux demeurent solides, même s'ils commencent légèrement à se dégrader... Le rendement est attractif comparé aux actions. Depuis le début de l'année, les flux sont d'ailleurs largement positifs sur l'Investment Grade tant aux Etats-Unis qu'en Europe.